HISTOIRE DES HABITANTS DE L'ÎLE

   Les Données dans cette page sont inspirées d'une étude qui s'inscrit dans le cadre d'un projet franco-tunisien associant le Musée de l'Homme de Paris et la Faculté des Sciences de Tunis. Il a pour objet l'étude du polymorphisme génétique à Djerba

 
Préhistoire :
On présume que Djerba était déjà habitée au Paléolithique (Acheuléen). La fin du Paléolithique aurait connu les Capsiens, ancêtres hypothétiques des Berbères. Le Néolithique a vu arriver des populations de Méditerranée orientale qui introduisirent la poterie et la culture de l'olivier.
Antiquité :
Au XIIIe siècle av. J.-C., Homère écrivait dans l'Odyssée : " Ulysse roi d'Ithaque découvrit l'île des Lotophages..." Les auteurs situent cette île au sud de la Petite Syrte (actuel golfe de Gabès) à l'emplacement de Djerba. Les Phéniciens ont sûrement colonisé Djerba avant de fonder Carthage - au IXe siècle av. J.-C. - car leurs comptoirs commerciaux étaient depuis longtemps établis le long du littoral syrtique. Au IIIe siècle av. J.-C. les Carthaginois occupaient Djerba qu'ils appelèrent Meninx (Bertholon 1889). Djerba dériverait de Ghriba (antique cité sise près de Houmt-Souk, la capitale de l'île), mais d'après Ibn Khaldoun, elle tiendrait ce nom d'une branche de la tribu berbère des Lemaya. Après la destruction de Carthage, les Romains construisirent la chaussée reliant l'île au continent. A cette époque, Ghriba était un important évêché et l'île un trait d'union prospère entre l'Afrique et l'Europe.

 
Moyen Age :
Au VIIe siècle les Byzantins succédèrent aux Romains. L'intermède vandale n'aurait peut être pas eu lieu à Djerba. En 665, Djerba fut conquise par les Arabes qui en chassèrent les Byzantins et convertirent les Berbères à l'islam. Il y aurait eu alors, d'après certains auteurs, un important brassage génétique.
Les Musulmans venus en Afrique du Nord avec la conquête arabe au VIIe siècle étaient " orthodoxes ". Au IXe siècle, des " hétérodoxes " Kharéjites Abadhites (ou Ibadites) berbères arrivèrent en masse. Au Xe siècle, le Maghreb adopta l'orthodoxie : c'est à dire la doctrine professée par l'une des quatre écoles juridiques reconnues, à savoir le Malékisme, le Hanafisme, le Chafiisme et le hanbalisme. Les Abadhites se dispersèrent et se retirèrent dans des endroits difficiles d'accès tels que le Mzab (en Algérie), le Jebel Nefoussa (en Libye) et Djerba. L'islamisation n'atteignit pas certains Juifs qui se concentrèrent dans les deux villages d'Essawani et Erriadh (ex Hara Kebira et Hara Seghira) au nord de l'île.
D'où et quand étaient-ils venus ? On ne saurait le dire avec précision car il n'y a aucun vestige ou document écrit appuyant la tradition orale (unique source pour le moment). Celle-ci véhicule plusieurs versions dont la plus répandue rapporte que les Juifs seraient arrivés lors de la destruction du Temple de Jérusalem par Nabuchodonosor en 586 av. J.-C. Ils auraient sauvé certains manuscrits des Tables de la Loi et auraient emporté des pierres du Temple sur lesquelles fut élevé le sanctuaire de la ghrîba devenu lieu de pèlerinage pour les Juifs du monde entier. Plus tard (au XVe siècle), des Juifs expulsés d'Espagne par les Rois Catholiques arrivèrent en Tunisie et quelques uns d'entre eux s'installèrent à Djerba, plus particulièrement à Hara Kebira.

Jusqu'à nos jours :
Du IXe siècle au XIXe siècle, Djerba connut de nombreux conflits. Elle fut envahie par les Fatimides de Mahdia, les Bédouins de Beni Hilal, les Germains et les Normands de Sicile, les Almohades du Maroc, les chevaliers de Malte, les Génois, les Espagnols, les nomades continentaux et les corsaires turcs à qui elle servit de repaire. Au XVIe siècle, les Jerbiens se rebellèrent contre le Pacha turc. Au XVIIe siècle, l'île obéissait à la Régence de Tunis. Au XVIIIe siècle, Tunisiens et Tripolitains se disputèrent Djerba. Les Tunisiens l'emportèrent et l'île devint le terminus des caravanes et un gros marché d'esclaves. Au XIXe siècle, après l'abolition de l'esclavage, ce marché s'installa à Tripoli. En 1881, le protectorat français s'établit sur la Tunisie, jusqu'à l'indépendance en 1956. Au début des années soixante, le tourisme commença à se développer. Il semblerait donc après ce survol du passé, que pas moins de 18 vagues de migration se soient succédées à Djerba.

Aujourd'hui :
De nos jours, on rencontre à Djerba des Musulmans (Arabes, Berbères et Noirs) orthodoxes et hétérodoxes ainsi que des Juifs. On y rencontrait aussi (selon les dernières sources datant de 1967) des Maltais, des Français, des Italiens et des Grecs. Les Noirs seraient les descendants d'esclaves amenés du Soudan ou du Niger ; ils résident surtout dans le nord-est de l'île, dans le secteur de Midoun. Les Musulmans orthodoxes sont soit Hanéfites (d'origine turque), soit Malékites (les plus nombreux) descendant d'Arabes venus du continent (peut être des Hilaliens) et, dans une moindre proportion, des Kharéjites convertis.